Le Tour en fête. OS.

Bill frémit. Il ne voyait vraiment pas ce qu’il faisait dans cette galère, vraiment pas. Mais comment diable était-il arrivé là ?!
Il était assit sur un vélo, entouré d’une horde de cyclistes effrontés, pour l’instant à l’arrêt, aux dossards multicolores. Le sien était turquoise, mais il n’avait que le haut de la combinaison, car il portait un jean et une paire de baskets blanches. Quant au casque, il était sur lui inexistant, remplacé par sa large et habituelle corolle de cheveux noirs, teintés de fils d’or.
Le ciel au dessus de lui était lourd, nuageux, et l’immobilité des autres sportifs renforçait sa vague impression que le temps était arrêté. Curieux.
Il y avait des gens partout autour d’eux, beaucoup beaucoup de gens, mais il les remarqua à peine : il venait d’apercevoir son frère, tout là bas, avec une de ses éternelles casquettes vissait sur la tête et un de ses éternels baggui. Seul son haut était semblable à celui de Bill.
Tom eut juste le temps de lui lancer un regard de détresse que le coup de feu retentit… et que la course commença, sous les acclamations des supporters. Bill fut obligé de pédaler le plus vite possible pour ne pas se faire rouler dessus par les cyclistes de derrière. Ses baskets, plus d’apparat que de sport, lui faisaient terriblement mal aux pieds. Quant à son jean, il lui donnait les larmes aux yeux…
Mais dans quel putain d’bordel j’me suis foutu, moi ?
Il chercha à nouveau Tom du regard, ce qui n’était pas facile parmi cette farandole de couleurs vives en perpétuel mouvement. Il le repéra néanmoins rapidement, à son allure déjantée… et totalement ridicule. Tom tenait sa casquette d’une main pour l’empêcher de s’envoler, et son baggui ne cessait de se coincer dans les pédales… il était vraiment dans de sales draps, mais paraissait plus perdu qu’apeuré.
Soudain, quelqu’un dépassa Bill. Quelqu’un avec des cheveux brun foncé moyennement longs voletant librement derrière lui.
« Georg ? » Hoqueta t-il, essoufflé.
Mais ce dernier ne lui accorda pas un regard, se contentant d’accélérer. Il portait un pantalon de jogging. Bien pratique…
« Il file vers la victoire » chuchota quelqu’un.
Bill tourna la tête et aperçut Gustav. Il avait le visage rouge, mais paraissait franchement s’éclater. Avant que Bill n’est pu ajouter quoi que ce soit, il le dépassa à son tour.
Bill resta sagement dans les derniers du peloton, sans voir comment s’en sortir. Ca montait, et au fur et à mesure, Bill commençait à devenir vraiment éreinté. Il était perclus de crampes, et Tom semblait dans le même état, à l’exception près qu’il fulminait maintenant de rage. « J’aurais pu la gagner, c’t’fichue course si j’avais un vrai matos ! » semblait dire son regard.
Bill demanda brièvement à son voisin dans combien de temps ils atteindraient l’arrivée. Celui-ci ne parut, pas plus que le reste des personnes présentes, se formaliser de la tenue du jeune gomme et lui annonça d’un ton jovial : « Il reste à peu près quatre heure et demi ».
Bill en resta coi. Tout ça… c’était impossible !
Et pourtant il continua à souffrir le martyr en pédalant, tandis que les supporters défilaient gaiement à la limite de son champ de vision. Il n’en pouvait plus. Soudain, ce qui devait arriver arriva, et son jean se prit dans l’une des chaînes métalliques qui courraient sous le vélo. Il bascula en avant, lentement, et vit la barrière du côté de la route se rapprocher dangereusement alors qu’il déviait de sa trajectoire…
« Haaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa ! » Hurla t-il.
Il ressentit brusquement un liquide froid, voir même glacé, lui éclabousser le visage. La barrière et les pics montagneux s’estompèrent pour laisser la place au visage soucieux de son frère.
« Bill ?
- GIAH ! C’EST G’LĖ !
- Désolé, mais tu criais tellem’ent que j’ai été obligé de te réveiller en utilisant la manière forte… »
Il posa un verre sur la table de chevet.
« Ma tête… » murmura Bill.
Il s’assit sur le lit et se prit la tête entre les mains avant de parcourir la pièce du regard, incrédule. Une chambre d’hôtel… ?
Posée négligemment en haut de la commode qui lui faisait face, une télévision montrait l’ascension des Pyrénées par les coureurs du Tour de France.
Bill éclata de rire.
« Bill ? Ca va ? Y a une minute on aurait dit que t’avais fait l’Tour de France tellement t’avais l’air crevé et…
- Tu crois pas si bien dire ! » Le coupa t-il.